mardi 10 juillet 2012

Critique #65 : Johnny Comet Volume 1



Avant de devenir un artiste mondialement connu grâce à ses travaux en matière de science fiction et de fantasy, Frank Frazetta a travaillé dans le monde du comic strip. Il est surtout connu pour sa collaboration (qui durera presqu'une décennie) avec Al Capp sur le comic strip Li'L Abner (dont je vous parlerai dans une prochaine critique). Mais avant cela, il a été l'auteur du comic strip Johnny Comet. L'aventure a duré un an : du 28 Janvier 1952 au 31 janvier 1953 pour le daily strip et du 3 février 1952 au 1er février 1953 pour le sunday strip. Un aventure assez courte donc. Aventure interrompue par le McNaught Syndicate pour manque de popularité. Un arrêt justifié ?

 

Ce comic strip raconte les aventures de Johnny Comet, un pilote automobile réputé. Un jour, alors qu'il cherche à aider un autre pilote en grand danger, il crash son bolide. Résultat : il se retrouve sur les routes. Il n'a plus de contrat. Il décide donc de devenir un mécanicien ambulant offrant ses services à quiconque aura besoin de lui. Le destin fera qu'il se retrouvera un peu plus tard de nouveau sur les circuits...

 

Ce comic strip partait sur de bonnes bases. Le thème de fond (la course automobile) est intéressant et plutôt bien géré. Le héros est également intéressant. Un peu naïf peut être. Mais on a envie de suivre ses aventures. La galerie de personnages qui entourent Johnny est plutôt bonne. On a la belle Jean Fargo, propriétaire d'un petit garage automobile et un amoureuse du héros. Sparky est le mécano du garage (un personnage plutôt sympathique et prêt à aider les autres). Enfin, nous avons le couple marié Bottle, qui sont en quelque sorte l'archétype du père et de la mère de famille qui ont la cinquantaine. Bref, le casting est réussi. Malheureusement, on ne peux pas en dire autant de l'histoire. Elle est loin d'être mauvaise. Mais on se rend compte assez rapidement de la raison de l'annulation de ce comic strip. Johnny Comet a en effet une histoire ultra répétitive et très (on pourrait même dire trop) classique. Tout le long du run de ce strip, l'histoire suit le même schéma narratif : un ami de Johnny (ou une connaissance ou même un étranger) le contacte pour lui demander de l'aide. En règle générale, il s'agit d'aider quelqu'un à gagner une course (Johnny prenant de temps en temps le volant pour aider ladite personne). Bien évidemment, à chaque fois, des personnes mal intentionnées tentent d'empêcher notre héros de réussir dans son entreprise. La résolution de l'histoire étant la aussi toujours la même : le coupable laisse invariablement une preuve de son forfait et avoue tout de suite son crime (dès qu'il se fait prendre). La répétitivité de l'histoire additionnée à son manque cruel d'originalité ont eu raison de la viabilité du strip. Ce qui est vraiment dommage. Car il y avait vraiment de quoi faire une histoire intéressante. Pourquoi ne pas avoir ajouté une petite dose de romance entre Johnny et Jean par exemple ? Pourquoi ne pas avoir écrit une histoire autour de la fameuse course « Les 500 miles d'Indianapolis » ? Ou tout simplement, pourquoi ne pas avoir cherché à diversifier les schémas narratifs ? Le résultat que l'on constate nous donne envie de dire que le syndicate a juste cherché à profiter du nom de Peter DePaolo, un coureur de renom de l'époque (on apprendra plus tard que le véritable scénariste s'appelait Earl Baldwin. Il sera d'ailleurs ajouté aux crédits (à la place de Peter) vers la fin du strip), pour attirer le plus grand nombre de lecteurs. Malheureusement, une telle stratégie ne peut fonctionner sans une histoire originale. Le sunday strip était également peu intéressant. Les premiers strips laissaient croire que le rendez-vous dominical serait à suivre. Mais finalement, il va suivre le même schéma que le daily strip. La popularité du sunday strip ne sera jamais très élevée. L'éditeur essaiera même de transformer la planche du dimanche en gag (centrée sur le couple Bottle). Mais le résultat ne sera pas très convaincant. Il y a déjà des strips humoristiques bien plus aboutis. 


En ce qui concerne le style graphique de Frank Frazetta, il est juste magnifique. Son trait très réaliste est un pur régal pour les yeux. Les scènes d'actions (pendant les courses) sont très dynamiques. Ses personnages sont sublimes (son encrage est un vrai régal (je suis particulièrement fan de son travail sur les chevelures)). Frank Frazetta est particulièrement doué pour dessiner de très belles femmes, de véritables femmes fatales. J'ai personnellement une petite préférence pour le trait de l'artiste en noir et blanc. Mais il faut reconnaître que l'ajout de la couleur sur les sundays donne un rendu fort appréciable. Les planches couleurs sont elles aussi très belles à regarder. Lorsque l'on voit un tel art, on ne peut que regretter encore plus que l'histoire ne soit pas à la hauteur. 

 

L'éditeur Vanguard nous propose ce comic strip dans deux versions : une version hardcover et une version softcover. Je vais vous parler de la seconde (qui est évidemment moins cher que la première). Cette édition est de très bonne facture. Format A4. Les strips sont imprimés sur la longueur d'une page. Ils sont parfaitement reproduits. Les noirs et blancs sont nets. Les couleurs ne bavent pas. Il n'y a aucun problème de lisibilité. Le contenu éditorial est très bon. En plus d'un article de J David Spurlock sur Frank Frazetta, vous pourrez lire un article tout simplement passionnant de William Stout sur la période de parution du strip. 

 

Johnny Comet est donc un comic strip avec un gros potentiel. Lorsque j'ai lu les premiers strips, j'étais plutôt emballé. Et j'espérais au fond de moi qu'il y aurait un tome 2 (bien évidemment, je n'avais pas encore fait mes recherches pour écrire cette critique). Mais au final, ce comic strip me donne l'impression d'être un gros gâchis. Je ne crois pas que ce soit un titre indispensable à avoir dans votre collection. Les fans de Frank Frazetta pourront être intéressés. Les fous de comic strips (comme moi ^^) pourront y trouver un intérêt. Mais pour les gens « normaux », je ne peux pas vous conseiller l'achat. C'est un comic strip qui se lit. Sans plus. Dommage...

Note Globale : /5
Note du Livre :  et demi /5

7 commentaires :

  1. A bin au moins on sais pourquoi on va l'acheter celui-là, ou pas!

    Graphiquement, ce que tu nous montres est en effet magnifique et ce que tu nous dis du scénar catastrophique....j'ai l'impression de lire du Michel Vaillant pour le coup avec un jean Graton certainement plus inspiré scénaristiquement parlant et moins graphiquement :p

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    1. Effectivement. Je n'ai pas fait la comparaison avec Michel Vaillant car je connais assez mal cette BD. Mais le peu que j'en ai lu était quand même plus intéressant que Johnny Comet. Comme je le dis, ce strip se lit, sans plus.

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  2. Lorsque Graton avait proposé son projet, on lui avait répondu : "oui, mais qu'est-ce qu'il fera quand il aura gagné la course ?", ce qui mettait le doigt sur le caractère répétitif induit par ce genre. Ensuite, Graton a su intégrer des éléments extérieurs aux sports mécaniques (policier, espionnage, soap...) pour alimenter la fiction. Pour en revenir à ce strip, la planche couleur est vraiment superbe. Comme quoi, sans couleur informatique, on arrivait à faire de bons trucs.

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    1. En effet, le cast était quand même bien utilisé et l'histoire pas seulement focalisée sur le seul Michel.

      Et l'informatique, ce n'est pas forcement un pb de couleur mais vraiment de coloriste.

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  3. C'était un peu l'idée que je voulais faire passer.

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  4. Merci beaucoup pour cet article (et pour le blog que je découvre). Grand amateur de Frazetta, je n'avais pas encore franchi le pas de lecture en VO. C est maintenant chose faite avec cet album, que je viens de commander (suite à la lecture de votre rubrique). Continuez ce travail d'information passionnant . Merci encore.

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    1. Eh bien, ça fait plaisir de voir que de nouveaux lecteurs sont intéressés par ce blog.

      Je suis bien content d'avoir pu aider. Vous serez surement ravi d'apprendre que je parlerai prochainement (disons d'ici un mois) d'un autre comic strip auquel a participé Frank Frazetta : Li'l Abner.

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