lundi 4 juillet 2011

Critique #50 : Popeye Volume 1


Il y a parfois dans la vie des accidents "heureux", des choses non prévues qui se transforment en pain béni. Un de ces accidents est arrivé à E.C Segar. Tout le monde connait Popeye, probablement le marin le plus connu au monde. Il doit cette célébrité à de multiples dessins animés. Mais avant d'être un dessin animé, Popeye est le personnage principal d'un comic strip.



C'est le 19 Décembre 1919 qu'E.C Segar lance Thimble Theatre, comic strip publié initialement dans le New York Journal (et "géré" par le groupe de press King Features). Ce comic strip est centré sur Olive Oyl et son fiancé Harold Hamgravy. Au fur et à mesure du temps, d'autres personnages récurrents apparaitront : Castor Oyl (le frère d'Olive) et les parents de l'héroine (Cole et Nana Oyl). Le comic strip continuera à fonctionner de la sorte pendant 10 ans. Popeye fait sa première apparition le 17 Janvier 1929. Ce n'est alors qu'un personnage secondaire. En effet, il est embauché par Castor Oyl en tant que marin pour l'emmener sur son bateau jusque Dice Island, l'île du jeu. Chose amusante : Popeye aurait dû "disparaitre" à la fin de l'aventure. Mais devant les réactions des lecteurs, E.C Segar n'avait d'autres choix que de le faire apparaitre plus régulièrement. Il travaillera sur le titre jusqu'à sa mort en 1938 (d'autres artistes ayant repris le flambeau depuis lors). C'est le début de la success story Popeye, la "whiffle hen" de King Features...


Dans ce premier volume intitulé I Yam What I Yam, nous retrouvons donc les aventures quotidiennes de Popeye publiées entre le 10 Septembre 1928 et le 20 Décembre 1930. En supplément, l'éditeur Fantagraphics propose les strips dominicaux publiés pour la première fois entre le 2 Mars 1930 et le Février 1931. Les deux séries de strips sont lisibles indépendamment dans la mesure où leurs histoires ne sont pas connectées. Plusieurs histoires (qui forment un tout) sont proposées dans le daily strip. L'aventure commence avec Castor Oyl recevant de la part de son oncle la whiffle hen, cette poule "magique" donnant à quiconque frottant sa tête une chance hors du commun. Après avoir essayé pendant plusieurs semaines de la tuer, Castor Oyl se prend d'affection pour le volatile et décide de partir sur Dice Island, l'ile du jeu pour expérimenter sa nouvelle chance. Il engagera Popeye comme marin pour le conduire sur place. La chance étant bien avec lui, Castor Oyl dévalise littéralement le casino est repart chez lui bien heureux. Mais tout ne se passera pas comme prévu. En effet, le gérant du casino veut récupérer son argent. Et pour cela il est prêt à tout. Même à éliminer Castor Oyl et sa bande. Ils devront faire face également à des arnaqueurs, à un homme qui va courtiser Olive pour son argent, à un policier têtu comme une mule, à une sorcière des mers et à un mystère très mystérieux. Mais ce n'est pas tout d'autres aventures attendent nos héros... Dans les sunday strips, E.C Segar se focalise sur Popeye et sa relation avec Olive. Popeye essaie de séduire Olive par tout les moyens (en tabassant surtout les prétendants qui tournent autour de la jeune). Mais le problème est qu'Olive déteste la violence. Cette succession de bagarres conduira le marin a se lancer dans une carrière de boxeur. Carrière houleuse vu le comportement de Popeye sur le ring...


Ce premier volume est tout simplement excellent. Les dailies et sundays sont passionnants à lire. E.C Segar a très bon sens de la comédie. Ses aventures sont drôles, très amusantes. Les dailies reposent quasiment uniquement sur le duo formé par Castor Oyl et Popeye. Souvent en désaccord sur la démarche à suivre, il n'en reste pas moins qu'ils s'apprécient énormément. L'auteur nous le montrera d'ailleurs dans des retrouvailles touchantes après une grosse dispute qui avait conduit à une séparation temporaire du duo. Castor Oyl est un excellent personnage. Il cherche à tout prix à devenir riche. Mais son côté naïf et généreux le conduira toujours à revenir à la case départ : la pauvreté. Popeye de son côté est également très drôle. Il est borné, bourru. L'archétype du marin qu'il ne faut pas embêter. Mais il est également loyal et un bon ami. Ce qu'il le conduira souvent dans les ennuis. Mais il n'en a cure. Il affronte toujours l'adversité. Sauf quand celle-ci s'appelle Sea Hag, cette espèce de sorcière des mers dont Popeye a une peur bleue. Olive est également un personnage très intéressant. Elle est en général le cliché de la jeune femme plutôt sage (et un peu naïve). Mais avec le temps, l'auteur la dépeint comme une femme qui aime que les hommes lui fassent la cour. Elle est notamment hilarante lorsqu'elle commence à dépenser l'argent gagné au casino. Elle change totalement d'allure vestimentaire, prend des gouts de riche. Pour notre plus grand plaisir. Ce côté "femme fatal" est d'ailleurs plutôt développé dans les sunday strips. C'est d'ailleurs un des moteurs des strips dominicaux pendant plusieurs mois. Cette galerie de personnages (sans oublier tous les personnages secondaires) est vraiment bien exploitée. Ils ont tous un petit quelque chose qui vous fera rire. Les aventures sont simples, mais bien menées et prenantes. Segar n'oublie pas de placer plusieurs running gags qui fonctionnent parfaitement (notamment celui où Popeye ne cesse de s'évader de sa prison pour n'en citer qu'un). Côté graphique, on peut dire que E.C Segar est très talentueux. Son style cartoony fonctionne à merveille. Les personnages sont très expressifs. Son style déborde de dynamisme. Et que ce soit en couleurs ou en noir et blanc, ça fonctionne. Le trait de Segar nous emmène dans ses aventures. Une chose intéressante est à noter concernant le format des strips : Segar aime utiliser un grand nombre de panel dans chacun de ses daily strips. Quasiment tous les strips comptent cinq ou six panels. Ce qui permet à l'auteur de caser beaucoup d'action (et de discussion) dans ses strips quotidiennement. Et étonnamment, ça fonctionne très bien. L'auteur préférant se concentrer sur l'efficacité de son trait plutôt que sur le côté contemplatif.


Comme on pouvait l'attendre, Fantagraphics a créé une nouvelle collection de toute beauté. Hardcover. Grand format (environ 37x27cm). Le livre compte 182 pages. Les strips sont reproduits parfaitement (que ce soit les dailies en noir et blanc ou les sundays en couleurs). Il est à noter qu'en dessous de chaque sunday strip, il y a un autre strip intitulé Sappo. Ce strip raconte les mésaventures de Sappo et de sa femme pour devenir riche. C'est globalement plutôt sympa. Certains strips étant moins bons que d'autres. Plutôt sympathique, mais pas indispensable. Fantagraphics n'a pas oublié d'ajouter du contenu éditorial. Vous aurez l'occasion de lire une introduction de Jules Feiffer et un article très intéressant du regretté Bill Blackbeard. Pour finir, la compréhension globale du livre est aisée. Pas de gros problèmes de langages une fois que vous aurez compris les tics de langage de Popeye. Rien d'insurmontable.


I Yam What I Yam, premier volume d'une série de six, est donc un achat indispensable pour tout amateur de bande dessinée (et a fortiori de comic strip). Cette sublime édition rend hommage au travail magnifique de E.C Segar, incontestablement un des maitres du comic strip.


Note globale : /5
Note du Livre : /5

1 commentaire :

  1. "Tout le monde connait Popeye, probablement le marin le plus connu au monde" : ne pas oublier Donald Duck ^^

    RépondreSupprimer